(Un extrait de mon prochain livre, From Fear to Freedom: Triumphing over Abuse and Difficult Relationships)
Je viens tout juste de garer dans un stationnement du centre-ville d’Ottawa. Je sors à la hâte de l’auto, valise à la main, pressée de me rendre en salle de classe. Un homme à casquette, assis dans son camion bleu, m’arrête au passage. Il pointe vers mon auto : « Regardez ! »
Je n’en crois pas mes yeux, une crevaison ! J’ai conduit sur l’autoroute, depuis la campagne, en pleine heure d’affluence. J’ai été prise dans un bouchon de circulation pour arriver à me garer avec un pneu… à plat. L’auto n’a jamais déraillé d’un pouce. Je lui souris et le remercie gentiment de m’avoir signalé la situation.
Je poursuis mon chemin d’un pas affairé. Pas le temps de m’occuper de ce problème, j’y verrai après ma journée de travail. J’ai un cours à donner dans moins de 30 minutes pour un nouveau client. J’ai beaucoup de matériel à préparer, je dois garder mon calme et rester en contrôle. Les participants entreront en classe d’une minute à l’autre et cette crevaison qui m’attend… quelle catastrophe !
Une voix surgit de l’intérieur : Oublie ça, on a un travail à faire ici, on s’en occupera plus tard. À la pause du dîner, je tente d’appeler Francis pour qu’il me prête main-forte, mais je n’arrive pas à le joindre. Qu’à cela ne tienne, j’appellerai l’assistance routière plus tard.
L’atelier se déroule à merveille. Je me suis tellement investie dans le travail que j’en ai oublié la crevaison. En sortant de l’édifice, je suis encore sous l’effet de l’adrénaline.
L’image du pneu dessoufflé me revient. J’imagine déjà devoir appeler l’assistance routière, attendre, dans un stationnement désert, qu’ils viennent installer le pneu de rechange. Puis il me faudra aller au garage… À mon tour de dégonfler. Je ressens soudain toute la fatigue de la journée. Je traîne des boulets dans mes valises.
J’entre dans le stationnement, tête basse et me dirige vers l’auto. Où est la crevaison ? Je n’ai pourtant pas la berlue. Je donne un coup de pied sur le pneu, complètement dur et gonflé à bloc. J’ai dû avoir regardé du mauvais côté de l’auto. Non, c’était bien le pneu arrière droit. Je ne pouvais pas voir celui de l’autre côté d’où je me tenais ce matin.
Mais alors, que s’est-il passé ? Est-ce que j’ai imaginé tout cela ? Est-ce que Francis a reçu mon message de détresse – par télépathie – et m’a porté secours ce midi ? Les idées se bousculent dans ma tête.
Perplexe, je me dirige vers la porte du conducteur pour déposer ma mallette dans l’auto. Une petite note, rédigée à l’encre bleue, a été glissée dans l’encoignure de la fenêtre. C’est écrit : J’ai mis de l’air dans votre pneu, après vous avoir signalé qu’il était crevé, ce matin. J’espère que vous en aurez assez pour vous rendre à la maison. Mike.
C’est l’homme à la casquette de ce matin ! Il s’appelle Mike. Après mon départ, il a pris le temps de mettre de l’air dans mon pneu et s’est préoccupé que j’en aie assez pour me rendre chez moi. Incroyable !
Par mesure de précaution, j’emprunte des rues secondaires pour me rendre au garage. Le pneu tient encore très bien la route. Le garagiste le répare sans attendre.
Au moment de payer, je vérifie :
— Y avait-il vraiment crevaison ou était-ce juste une fuite ?
— Non, il y avait bel et bien crevaison. Nous avons extirpé un long clou du pneu. Tout est rentré dans l’ordre maintenant.
Le comble, c’est que je suis arrivée à la maison avant Francis, à peine plus tard qu’à l’habitude… Le lendemain, j’ai essayé de retrouver le bon samaritain pour le remercier. Sur la note, la publicité identifiait un garage. J’ai téléphoné et le préposé m’a répondu : « Nous n’avons personne prénommé Mike ici ». Mystère et boule de gomme.
Cher Mike, si vous me lisez, je vous remercie d’être venu à ma rescousse. Oui, il y avait assez d’air pour me rendre au garage… et même à la maison… en toute sécurité. MERCI !
Notre vie est le reflet de nos attitudes. Encore une fois, au lieu de me concentrer sur le problème, d’en être irritée ou déstabilisée, je m’étais concentrée sur l’objectif. J’avais écouté la petite voix intérieure et j’étais demeurée attentive aux besoins des apprenants. J’avais même utilisé la situation comme exemple pour faire ressortir l’importance de rester calme lorsque sous pression. Les participants qui m’avaient vue performer depuis le matin n’arrivaient pas à croire que j’avais débuté ma journée avec un incident malheureux.
Je peux choisir d’être cause, au lieu d’être l’effet des circonstances. Si je m’étais laissée aller à l’apitoiement, à la colère ou au blâme, je me serais fermée à l’Amour, à l’aide et à la protection dont je bénéficie en gardant le cœur ouvert.
Co-exister avec un sentiment désagréable ou d’inconfort tout en continuant de cheminer vers son objectif est une compétence et une technique avancée qui peut être apprise. Elle est dérivée des trois principes de l’approche Morita, une des deux psychothérapies pratiquées au Japon, qui sont au cœur des programmes éducatifs sur la psychologie japonaise. Les trois principes Morita sont:
Morita (action) et Naikan (auto-réflexion) sont deux approches de la santé mentale inspirées des deux psychothérapies pratiquées au Japon et également populaires en Europe. Leur but est de recentrer l’attention sur un objectif constructif. Shoma Morita (1874-1938) et Ishin Yoshimoto (1916-1988), les concepteurs de ces thérapies, se sont inspirés de leur pratique bouddhiste zen, simplifiée et dépourvue de toute composante religieuse, pour en faire deux puissantes techniques de maîtrise de vie qui conviendraient à nos vies modernes. Le Dr David Reynolds, anthropologue américain et ancien professeur d’université, a adapté et combiné les deux thérapies pour créer Constructive Living®, un programme éducatif qu’il a lancé en Amérique du Nord dans les années 1980. Des programmes de formation à la psychologie japonaise sont également proposés par l’Institut ToDo dans le Vermont depuis 1992. www.todoinstitute.org
- Connais ton but
- Accepte tes sentiments
- Fais ce que doit
Ce concept peut sembler nouveau dans une société où nombre de nos attitudes et actions (contrôlables) sont souvent justifiées par les émotions (incontrôlables). Agir à partir du but et non de l’émotion est une compétence rare qui permet de maîtriser sa vie et d’atteindre ses objectifs à un niveau très élevé. La capacité à tolérer les irritants tout en continuant à réaliser ses objectifs est pratiquée par ceux qui visent la réalisation de leurs rêves, quelles que soient les circonstances environnantes. Par exemple, la capacité de tolérer les irritants (blessures, erreurs, déceptions) tout en continuant d’avancer vers son objectif est la seule façon pour un joueur de football de franchir la ligne et de savourer le moment d’euphorie dont il a rêvé.