Leurrée jusqu’à devenir prisonnière d’une relation abusive

Plus tôt dans ma vie, j’avais été séduite sans le savoir, devenue prisonnière d’une relation abusive ou j’avais perdu ma liberté physique, financière et émotionnelle. Et oui, j’étais revenue vers cet homme, comme plusieurs femmes le font, sous l’emprise d’une attraction fatale.  

Une fois ma liberté et mon pouvoir retrouvés, je me suis promis de ne plus jamais y renoncer. En devenant spécialiste dans le domaine de la gestion des conflits et des comportements difficiles, je voulais m’assurer que d’autres femmes seraient en mesure de regagner leur liberté. Déterminées à ne plus jamais céder leur pouvoir et leur sécurité au profit de ceux qui voudraient en abuser.

L’histoire récente d’Anna Maria Tremonti, la célèbre journaliste et reporter canadienne, fournit le parfait exemple, de ce genre de retour malsain. Elle a porté le secret d’un mariage violent pendant des décennies. Elle est retournée elle aussi vers son abuseur à plusieurs reprises, jusqu’à ce qu’il lui dise que si elle ne partait pas, il la tuerait. À la limite de l’extrême, après avoir subi plusieurs sévices, elle doutait encore qu’il pense vraiment la tuer !

Sur le plan personnel, j’ai vécu plusieurs expériences avec des personnalités difficiles.  Plus tard, j’ai poursuivi des recherches spécialisées sur le sujet et développé les compétences pour identifier et aborder les comportements toxiques. J’aide maintenant des individus et gestionnaires, à titre de coach professionnel et pendant des années j’ai enseigné en milieu universitaire, comment gérer au mieux ces comportements. En entreprise, je travaille comme consultante spécialisée auprès des leaders abrasifs. J’offre également des consultations privées aux personnes qui ont eu affaire à des individus violents et dominateurs et qui veulent en guérir, retrouver leur équilibre et leur autonomie. 

Des années après mon saut par la fenêtre, j’ai finalement compris à quoi cet événement me préparait. Au moment de livrer un atelier de développement professionnel à l’université sur les comportements difficiles, j’ai décidé en début de formation de ne pas présenter le profil de la personnalité psychopathe.  Cette information faisait partie du nouveau matériel que je venais d’ajouter à mon cours.   

Alors que les participants s’engageaient dans un jeu de rôle, j’ai pris quelques minutes pour me détendre. Soudain, j’ai entendu une voix à l’intérieur me demander de ramener le sujet que j’avais sauté.  Je ne peux pas, ai-je répondu, c’est trop tard : j’ai couvert le sujet des troubles de la personnalité en cours de matinée. Pourtant, la voix insiste : « Introduis le sujet ». 

À mon retour en classe, je dis : je sais que nous avons abordé le sujet des troubles de la personnalité ce matin, mais j’ai ajouté de nouvelles informations à mon cours et je pense qu’il serait important que je les partage avec vous. J’ai expliqué et défini la personnalité psychopathe et répondu aux questions. Un des apprenants m’a téléphoné deux jours plus tard pour me partager que le sujet l’avait profondément secoué au moment où j’ai dit que les psychopathes n’étaient pas tous en prison. La personne prenait soudainement conscience qu’elle avait toujours cru que si son agresseur était un psychopathe, il serait sûrement en prison.  À son grand désarroi, elle venait de réaliser que le danger était plus près d’elle qu’elle ne le pensait et a pris les mesures appropriées pour se protéger. 

C’est un sujet important dont il ne faut pas avoir peur de parler. Une force m’avait sauvé la vie des années auparavant pour que je puisse aider d’autres femmes plus tard à préserver leur vie. Un cadeau reçu venait d’être redonné. Je continue à grandir et continue de faire confiance à ma voix intérieure, ce qui me rend plus efficace et plus utile à mes semblables. 

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Jocelyne Durand